Bonjour à tous

Tout comme vient de le faire Madame la présidente sortante, Je vous remercie toutes et tous de votre présence. Je vous adresse, mes vœux les plus chaleureux pour cette nouvelle année 2020.

Je ne reviendrais pas sur les chiffres qui vous ont été présentés par Madame la présidente sortante si ce n’est mon souhait de réduction du taux de départage bien que sur ce nombre important, il y ai une très grosse série de 38 dossiers CAMIVA.

Il nous faut prendre exemple de nos collègues des conseils d’Aix les bains et Albertville en la matière

Mais pour en avoir grandement discuter avec les présidents et vice-présidents employeurs et salariés de ces conseils, un climat bien plus serin semble y être installé aussi.

L’année 2020, comme vous avez pu le remarquer, s’ouvre dans un climat de luttes et de manifestations importantes contre la réforme des retraites et celle impactant le fonctionnement de notre juridiction par la grève illimitée décidée par le Barreau.

Cette grève est pleinement justifiée par la remise en cause du système particulier de retraite des avocats, un système solidaire et excédentaire, qui conduirait non seulement à baisser la pension de retraite pour tous les avocats mais conduirait surtout au doublement des cotisations, avec comme conséquence une répercussion inévitable de cette hausse sur les honoraires, excluant de fait une partie de la population d’hommes et femmes les moins aisés, et donc l’accès à la justice en particulier celle du travail.

 

Le barreau comme l’ensemble de ceux qui s’opposent à cette réforme, syndicats, gilets jaunes, et les quelques 63 % de la population qui soutiennent ces mouvements sociaux se retrouveront dans les premiers mots du poème de 1848 de Victor Hugo :                   « Ceux qui vivent sont ceux qui luttent »

 Beaucoup de changement en ce début d’année 2020.

Les nouvelles réformes judiciaires ont un impact certain sur le Conseil des Prud’hommes  de Chambéry, dans son organisation technique, matérielle mais aussi et surtout dans la gestion humaine.

Madame la Directrice de greffe nous a bien aidé en cette fin d’année 2019 et début 2020 dans ces problématiques jusque-là, inconnues au conseil des prud’hommes et je pense que nous serons contraints de la solliciter, durant cette année. Et si nous avons une absence maladie, le  greffe serait contraint de fermer.

Le personnel du greffe du conseil des Prud’hommes de Chambéry, les différents stagiaires venus en renfort durant l’année ont œuvré par leur professionnalisme au bon fonctionnement de notre conseil.

Et je tiens à les remercier grandement car sans eux n’oublions pas il n’y aurait pas de justice rendue.

De leurs aides et l’écoute sur nos problématiques techniques et humaines et notamment de nos difficultés pour nos salles  d’audience nœud incontournable de la tenue des audiences,  « oui nous avons pris acte que pour ajouter une audience ou en modifier la date il nous faut connaître de la disponibilité très restreinte des salles d’audience» 

Pour autant, la récurrente question des moyens en personnel reste toujours là,

Le regroupement des greffes dans un pôle où le nombre de greffiers déjà déficitaire à la base ne résoudra pas les problèmes de fond de manque de personnel et n’aura que malheureusement l’effet d’un pansement sur une jambe de bois si rien n’est fait.

Comme rappelé lors des différentes audiences solennelles et je m’y joins aussi, le personnel du greffe travaille dur à palier tous ces manques, au détriment parfois de leur vie familiale de leurs congés, ce qui est déjà grave en soit, mais il ne faudrait pas que ce soit au détriment de leurs santé physique ou morale.

La recrudescence des maladies tels les burn-out est aussi le fruit de ces charges de travail trop importantes.

Le proverbe « une de perdue 10 de retrouvées » ne trouve pas application dans les nouvelles dispositions mises en place.  Il faudrait au moins que les départs des greffiers soient remplacés.

Le manque de personnel et de moyens financiers devient une normalité quand on parle de justice en France.

La France investit deux fois moins par habitant que l’Allemagne pour sa justice.

Sur 1000 € de dépenses publiques seulement 4 € sont consacrés à la justice en France.

Les mesures prises par le pouvoir politique actuel entrainent un préjudice certain pour le justiciable et indéniablement une mauvaise perception de la justice par ses citoyens.

Toutes les réformes antisociales dénoncées par le plus grand nombre de concitoyens de notre pays comme sur les retraites et la destruction des services publics attisent malheureusement la colère.

Les nombreux épisodes de mobilisations  des gilets jaunes, de manifestations de syndicats, d’avocats en colère, de rassemblements de nombreux citoyens dans les rues,  de contestations en tout genre, n’ont pas fait prendre conscience à ce gouvernement  que la grande majorité de nos concitoyens de notre pays ne souhaitent pas de ces réformes de précarisation de la société et plus particulièrement celle des femmes qui tout au long de leurs carrière ont injustement des salaires moindre pour un même travail, des périodes de travail hachés non reconnues et aujourd’hui si cette réforme des retraite était appliquée des retraites bien moindre

Alors que d’autres solutions sont proposées et possibles.

Le gouvernement poursuit aussi sa méthode d’imposer autoritairement des réformes de grande envergure visant à réduire les droits des travailleurs.

la réduction des prescriptions

      – L’inversion de la hiérarchie des normes juridiques  

      – la rupture conventionnelle

      – la restriction du pouvoir d’appréciation du préjudice    

        par le juge prud’homal

      – la rupture conventionnelle collective 

       Et bien d’autres encore

Réformes qui affaiblissent les droits des salariés, et précarisent le monde du travail au bénéfice de profits financiers.

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Par ordonnance du 22 septembre 2017,  le gouvernement a restreint les pouvoirs du juge par l’instauration du barème dit MACRON

Il y a quelques mois, en juillet, le Ministère du Travail et celui de la justice considéraient que la question du barème était réglé, puisque la cour de cassation avait donné un avis, circulez-y-a rien à voir, se permettant aussi la critique de ces conseillers prud’hommes qui peu au fait du droit résisteraient à cet avis.

Mais dans les semaines qui ont suivi, des CPH, soit en parité soit par juges départiteurs, le dernier en date, un jugement du CPH de St Germain-en Laye du 21 janvier 2020, écartaient à nouveau le barème, n’oublions pas  que celui de Grenoble l’année dernière en a fait de même,  deux cours d’appel, celle de Reims et de Paris, ont eu une appréciation différente quant à l’application directe de l’article 24 de la charte sociale, la réparation adéquate du préjudice pour un salarié abusivement licencié, Reims considérant son application directe, Paris la refusant !!!

La messe n’est donc pas dite, nous sommes dans l’attente des recours devant le conseil européen et de l’OIT, mais aussi de la chambre sociale de la cour de cassation qui aura l’occasion non pas de donner un avis, mais de juger concrètement une affaire.

Montesquieu Nous rappelait dans une de ces citations :

«Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi. Mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. »

J’ajoute que derrière cette confrontation de règles, qui peut apparaître comme un combat juridique ouvert aux initiés, il y a des salariés, hommes et femmes, licenciés abusivement qui ne saisissent plus la justice car le barème est bien trop faible en termes d’éventuelles condamnations, ou dont le préjudice n’est pas proportionnel à ce qui est un licenciement reconnu sans cause. Une indignation supplémentaire pour ces travailleurs femmes et hommes les plus précaires qui s’éloignent toujours plus de l’institution judiciaire.

Et pourtant,  bien avant Montesquieu, Platon  écrivait (je cite)

«Le plus grand mal, à part l’injustice, serait que l’auteur de l’injustice ne paie pas la peine de sa faute.»

Toujours en juillet 2019, un rapport de la commission sociale du Sénat, après une enquête auprès de plusieurs CPH rendait un rapport énumérant 46 propositions.

Un certain nombre de ces propositions du rapport pointe justement le manque de moyens des conseillers et de la justice prud’homale, mais certaines sont plus folkloriques au regard des enjeux, le port de la robe pour les conseillers, ou le changement de nom du CPH.

Mais sous cet habillage, les vieilles recettes refont leurs apparitions, conciliation facultative, passage direct devant un juge professionnel si les parties le décident, pour finir sur l’échevinage qui pourrait être mis en place dans des cours d’appel pilotes, rien de bien nouveau qui n’ait déjà été proposé.

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Pour contrebalancer ce rapport, il faut signaler l’excellent rapport d’Evelyne Serverin sur l’étude des décisions rendues par les CPH de 2004 à 2018, qui met à mal quelques idées reçues.

Plus  de 13 % de conciliation ; un taux d’appel en baisse ; et la démonstration que la baisse des affaires est concomitante avec la mise en place de la complexification de la requête, l’atteinte à l’oralité des débats, les prescriptions raccourcies, le barèmes Macron, les ruptures conventionnelles.

Dans ce contexte très particulier, Permettez-moi de témoigner de l’utilité de notre justice prudhommale qui sert à pacifier les relations sociales :

Les conseils de prud’hommes ont en charge cette mission de pacification des relations entre employeurs et salariés lorsque le dialogue est rompu.

Des situations conflictuelles sont jugées par des conseillers qui connaissent la réalité du travail au sein des entreprises. Ce sont des personnes qui s’investissent pleinement bien que certains conseillers salariés rencontre des difficultés avec

leurs employeurs, ils prennent leur rôle très à cœur pour être acteur de cette justice sociale à qui il faut faire confiance.

L’une des clés de la paix sociale réside en effet dans cette confiance : il faut arrêter cette défiance envers la démocratie sociale pour faire confiance aux partenaires sociaux.

Je rends donc hommage au travail de l’ensemble des conseillers, au personnel de greffe ainsi qu’à tous les partenaires et acteurs du conseil : les chefs de cour pour la logistique, le parquet pour son rôle dans l’appréhension des situations illicites dont ils seraient amenés à connaître  (travail dissimulé, exploitation des salariés…) le concours des  avocats pour clarifier et argumenter  les demandes des justiciables …..sans oublier le rôle de notre juge départiteur sans vouloir lui donner plus de travail en 2020 !!!

Je vous remercie de votre attention

Monsieur le Procureur avez-vous d’autres réquisitions ?

Je prends acte de vos réquisitions, et dit que du tout il sera

dressé procès verbal

Je déclare close l’année judiciaire 2019 et ouverte l’année

judiciaire 2020

Et comme dit la plaisante sagesse savoyarde,

« Vaut mieux prendre chaud en mangeant que froid en travaillant »

C’est pourquoi nous vous invitons à un moment de convivialité autour du verre de l’amitié et comme le veut la tradition, accompagné de délicieuses bugnes.